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De: jct Date: 16-07-2007 à 19:24 |
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et oui, Delerm est l'inventeur du panier de fruit,nom d'un celebre yaourt celebre dont le succes me fait vivre ( enfin un peu, je suis qu'un pauve paysan...) [...] JE REVOIS ENCORE CETTE RÉUNION de travail où tous les gens du marketing Yopla s'étaient réunis. Il fallait une idée fraîcheur, nature, mais sans tomber dans les stéréotypes grand-mère, verger, vie d'autrefois. Duval avait proposé " Saveur des champs ", et Dupont-Lachaume, le P-DG, avait eu une petite moue accompagnée d'un balancement de tête - trop convenu, banal, vu cent fois. Dumontier - ce pauvre Dumontier - croyait mieux faire avec son " Douceur-soleil ", mais Dupont-Lachaume l'avait vite renvoyé dans son coin : - Dumontier, mon vieux, soyons sérieux ! Je ne vous demande pas une chan- son d'Alain Souchon 1 . Du contracté, du vrai, mais pas d'elliptique. On s'adresse à un grand public ! Moi j'étais là, vaguement en marge. Mon statut indécis d'écrivain-publiciste 2 , payé à la pige 3 , me donnait un rôle un peu extérieur. Et tout d'un coup, j'avais lancé : " Panier de fruits ". Au désappointement de Duval et de Dumontier, j'avais senti tout de suite que c'était gagné. - Panier de fruits ! Panier de fruits ! Mais oui, trois fois oui, panier de fruits ! Il en mangeait déjà, Dupont-Lachaume. - Bon sang, c'est juste ça ! Ça arrive sur la table, produit du marché, couvert de rosée, ça n'a transité nulle part. En même temps, ça ne fait pas ringard... L'absence d'article ! Très importante, l'absence d'article. " Le panier de fruits ", ça serait nul. Mais " Panier de fruits ", c'est génial. Messieurs, je crois qu'on va pou- voir décliner tout ça à notre aise. Panier de fruits ! Ce jour-là, je dois le dire, mon rapport avec le langage fut bouleversé. Vingt mille francs pour trois mots. Dupont-Lachaume s'était-il montré trop généreux ? Je ne saurais l'affirmer. On m'a dit depuis - sans doute pour me faire de la peine - que ces trois mots avaient rapporté des millions à Yopla. Il n'empêche. Vingt mille francs pour trois mots, cela changeait quelque peu mon échelle de valeurs. Deux ans auparavant j'avais touché une avance de six mille francs pour un premier roman qui m'avait coûté deux ans d'écriture, trois ans d'envois par la poste, beaucoup d'espoirs et de mélancolie. Un an après la parution, quand je m'étais enquis de mes droits d'auteur, on m'avait expliqué que mon à-valoir 4 res- tait acquis malgré un solde débiteur 5 - à l'évidence, j'étais loin d'avoir vendu pour six mille francs ce meilleur de moi dont l'accouchement me donnait encore la nausée. Et voilà qu'en regardant distraitement le brouillard de novembre par la fenêtre, j'avais prononcé du bout des lèvres trois mots à vingt mille francs. Trois mots édités bientôt à des millions d'exemplaires, avec une espèce d'éclat anonyme dont je me sentais délicieusement propriétaire. Philippe Delerm, L'Envol suivi de panier de fruits (Librio, 1999) Réponse à ce Message | 8 - oups... j'allions oublier... par jct (16-07-2007 à 19:25) 9 - Yop par Cirrus (16-07-2007 à 19:57) 10 - ah kay kay... par jct (16-07-2007 à 20:02) 11 - Ben pourquoi par Cirrus (16-07-2007 à 20:23) |